jeudi 23 juillet 2015

Rébellion en Casamance : aux origines du conflit



Voilà trente-deux ans qu’un conflit entre l’armée sénégalaise et une rébellion déchire le Sud du Sénégal. La spoliation des terres de la verte Casamance considérée comme le grenier du pays, a été le déclencheur de cette guerre qui perdure.


Séparée du reste du Sénégal par l’enclave que constitue la Gambie, la Casamance est une région aux richesses infinies : ressources naturelles, pluies abondantes, nature généreuse etc. Depuis plus de trois décades, elle est en proie à des luttes fratricides entre les forces armées sénégalaises et la rébellion incarnée par le Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance (MFDC). Il faut d’emblée préciser que la basse Casamance est le lieu de localisation de ce conflit séparatiste.
L’application tardive, en Casamance, de la loi sur le domaine national datant des années soixante, a permis à l’État du Sénégal de confisquer des terres dans le littoral de Cap-Skiring pour permettre à des investisseurs étrangers de construire des infrastructures hôtelières. A la fin des années soixante-dix, les populations autochtones se sont mobilisées pour dire non à cette décision étatique. Selon Jean-Claude Marut, auteur de l’ouvrage “ Le conflit en Casamance : ce que disent les armes ”, cette opération s’est faite « sans consultation des autochtones, au profit des étrangers, sans indemnisation et sur la base d’un clientélisme politique  ». Au Sénégal, le système foncier est constitué de trois sous-ensembles à savoir le domaine national, le domaine de l’État et les titres fonciers des particuliers. Le domaine national a été institué par la loi N° 64-66 du 17 juin 1964. Il est composé de quatre zones : la zone de terroir destinée à l’agriculture, à l’élevage etc, les zones urbaines qui sont immatriculées par l’État, les zones pionnières réservées à certaines activités et les zones classées (forêts classées). De facto, depuis son entrée en vigueur, les Sénégalais y compris les Casamançais qui ne disposaient pas de titres fonciers, n’étaient plus propriétaires des terres au plan juridique. Cependant, pour les populations casamançaises, ces terres ayant appartenu à leurs ancêtres, étaient leurs propriétés même si elles ne disposaient d’aucun document légal.  « Les revendications des autochtones n’avaient pas de relais et le conflit était relégué au second plan  », regrette Jean-Claude Marut.  Ainsi pétitions, manifestations voire incendies et saccages d’édifices publics sont devenus le « modus operandi » des Casamançais pour se faire entendre. Ils tiennent, le 26 décembre 1982, une marche pour l’auto-détermination de leur région. Lors de cette manifestation non autorisée par les autorités administratives, le conflit foncier est mis en avant pour justifier l’aspiration à l’indépendance. Décembre 1983 marque le début d’affrontements sanglants entre les populations révoltées et les forces armées. Les Casamançais, rescapés de ces échauffourées, décident alors de s’installer dans la forêt pour continuer le combat. Ce qui marque alors la naissance du maquis. Ce conflit, qui a provoqué le déplacement de plus de soixante-mille personnes vivant le long de la frontière bissau-sénégalaise, constitue à ce jour, un véritable frein au développement de la partie Sud du Sénégal.

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